Je sais pas… Christophe Marx Mai 2109

Notre question nous semblait pourtant précise, explicite et bienveillante. 

Elle demandait une information factuelle, ou était destinée à s’enquérir des émotions de l’autre, de ses besoins, de la manière dont on pourrait l’aider…

La réponse, articulée ou balbutiée, tombe pourtant  comme un couperet :  » Je sais pas… » 

Il semblerait que ce triste « Je sais pas » puisse s’analyser de trois façons différentes. 

JE SAIS PAS, peut vouloir dire  » Je n’ai pas l’information », quand il s’agit d’un élément extérieur, objectif.   » A quelle heure arrive son train ? »  » Y a -t-il des allergènes dans ce plat ? »   » Où se trouve le dossier sur la transition énergétique  ? » 

JE SAIS PAS peut aussi être une réponse « passive » au sens de l’analyse transactionnelle.  Ainsi la personne ne prend pas la responsabilité de répondre directement  : « je n’ai pas envie de te répondre », «  » tu m’énerves »,  » ce n’est pas le moment »,  » ça ne te regarde pas », « ta question est sans intérêt »…

JE NE SAIS PAS peut aussi répondre à des questions aussi précises que  » Qu’est-ce que tu ressens ? »  » De quoi as-tu besoin pour te sentir mieux », « Comment puis-je t’aider ? » Les gens qui, dans leur propre cadre de référence, n’ont aucun problème pour dépister ce dont eux-mêmes ont besoin,  ce qu’ils ressentent, ou comment on peut les aider… n’imaginent absolument pas que des stimuli intérieurs, pré supposés comme évidents, peuvent être méconnus à ce point. Or, il est clair que certains ne savent réellement pas : 

– s’ils ressentent une émotion,

– a fortiori quelle émotion ils ressentent : sont-ils tristes ? en colère ? ont-ils peur ? 

-quel besoin archaïque est frustré,

– comment l’autre peut les aider, les soutenir, les soulager ….

Aussi incroyable que celui puisse paraître à certains, nombreux sont ceux dont la personnalité est  si troublée qu’ils ont du mal à dire « Je ». Les phrases comme  » Je ressens » ou  » J’ai besoin » commencent par « Je » et sont donc inopérantes. 

Il est donc opportun de ne pas prendre ces « Je sais pas » pour des réponses passives, et encore moins agressives. 

Il vaut mieux rester bienveillant, et proposer un comportement transmettant  une acceptation inconditionnelle  : une main sur l’épaule, un regard chaleureux et compréhensif…

Eventuellement, prendre l’initiative de proposer : 

 » Moi à ta place, je crois que je serais…. triste… ou en colère »

 » Et si je faisais ça pour toi, est-ce que ce serait bien ou pas ? » 

Quitte à entendre la personne se déterminer secondairement face à notre proposition :  » oh oui, je ne pensais pas que ce serait possible » ou à l’inverse  » Surtout pas ! je préférerais au contraire que …. » 

Qui sont ces gens qui, en se retournant vers eux -mêmes, ne rencontrent qu’un vide angoissant ? 

Ce peut être chacun de nous, à un moment ou un autre de notre vie.

Ce peut être certains adolescents,  coincés entre tant d’impératifs intérieurs, tant d’insécurité, tant de pulsions à réprimer…. 

Ce peut être certaines femmes aussi, car les petites filles qu’elles ont été furent conditionnées à être « gentilles », à ne rien  ressentir, et à ne rien demander pour ne pas déranger.

Alors, sachons faire la différence entre ces trois  » Je sais pas ».

Ceux qu’on entend… et ceux qu’on dit !

Christophe Marx 

Mai 2019 

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