Les deux principes qui président souvent à nos sont actions sont :
– Pas de vague
– Ouvrons le parapluie
Approchons-nous du coffret marqué : « Pas de vague ».
Il est recouvert d’un tissu soyeux et moiré.
On y trouve, en vrac, un « je ne peux pas lui faire ça ! », à côté d’un joli « fichez moi la paix » doré à l’or fin. Côte à côte, bien rangés dans leur écrin, « après moi le déluge », « je veux pas le savoir », « je ne suis pas payé pour régler ce problème », « ça nous dépasse complètement vous et moi », et au milieu un gros « on a toujours fait comme ça, c’est pas maintenant que ça va changer » ciselé en argent.
Sous le double fond, soigneusement empilés les uns sur les autres, une série de « il faudra y réfléchir sérieusement », « évitons de mécontenter les uns ou les autres », « attendons un peu », « que vont dire les gens », « attention aux journalistes » …
Voyons maintenant le petit bocal, sur lequel est écrit en lettres gothiques manuscrites : « Ouvrons le parapluie ».
Rangées comme des pastilles pour la gorge, nous trouvons un joli tas de « pourquoi pas, mais il faut l’accord de la hiérarchie », « est-ce que le directeur a donné son aval », « on ne pourra rien me reprocher », « il faut d’abord remplir en 4 exemplaires ce dossier de 16 pages », « qui l’a déjà fait avec succès ? » …
A ce régime, les chefs ne tranchent pas, car ils ont peur de ne pas être aimés.
Les responsables désavouent leurs subordonnés en cas de conflit avec le public. Du coup, les râleurs et les grandes gueules ont gain de cause : le salarié désavoué ravale sa rancœur et doit travailler malgré son sentiment d’injustice.
Les managers pervers et toxiques sont laissés en place, car ils obtiennent de bons résultats financiers.
Plus on monte dans la hiérarchie, plus on entend « Ne m’embêtez pas avec ces petits problèmes minables, qui ne me concernent pas. Débrouillez-vous, et arrêtez de vous plaindre » Un discours qui évacue le fait que si ce « petit problème minable » monte jusqu’aux oreilles du grand chef, c’est qu’il n’a pas pu être réglé en aval, et que le positionnement dudit grand chef se révèle nécessaire.
Les gens sont appréciés à hauteur de leur capacité à
– ne pas générer de vagues, “dans la rue, dans mon service, dans ma carrière, dans la société, dans mon quartier…”
– et surtout à bloquer celles qui arrivent d’ailleurs ( des côtés, et surtout d’en-bas !)
Alors merci à tous les faiseurs-de-vagues-pour-la-bonne-cause, les lanceurs d’alerte, les responsables responsables, les forts qui se mettent au service des petits.
On n’a pas tous les jours l’occasion de se montrer aussi vertueux.
Si on peut accompagner le mouvement, même si on ne l’a pas initié, c’est déjà bien.
Mais au moins, quand on rencontre ceux-là qui s’y risquent, ne leur mettons pas de bâtons dans les roues. Et disons leur merci.
Ils se sentiront moins seuls.
—
Christophe Marx
Avril 2016
Pour réagir à cet article :
Aucun commentaire