Article original du Dr Christophe Marx
Une nouvelle entité psychiatrique, à analyser finement !
Attention : le style volontairement polémique de cet article ne doit pas alimenter l’idée qu’une querelle de chapelle fera avancer le débat.
Il ne sert qu’à attirer le lecteur vers l’intérêt d’une lecture critique de la littérature professionnelle.
L’auteur tient à affirmer son profond respect pour la démarche des praticiens cités, leur rigueur scientifique, la validité de leurs options et l’éthique de leur approche.
La psychiatrie vient de pondre un nouvel oeuf : le tag.
Le trouble anxieux généralisé est en fait issu du démembrement de la pathologie anxieuse.
Un article des Dr Sisco, Charrel et Perretti, paru dans le N°66 de la revue AIM va nous en dire plus.
Le TAG se définit comme une anxiété accompagnée de symptomatologie somatique.
Rien de bien nouveau là -dedans.
Aussi bien le DSM-IV américain, que le CIM européen s’accordent pour le définir comme une anxiété accompagnée de symptômes somatiques. Les psychothérapeutes reconnaîtront ici la grande majorité de leurs patients. Mais lisons plus loin : le diagnostic repose aujourd’hui sur la notion de souci ou d’inquiétude excessifs dans la vie courante, pouvant concerner les différents événements ou activités, comme le travail ou les performances scolaires.
Par rapport aux autres troubles anxieux, les aspect somatiques sont au second plan, tandis que la durée d’évolution permettant de porter le diagnostic, est plus longue.
En 1994, la description du TAG s’est enrichie d’un critère supplémentaire : des difficultés à contrôler son inquiétude.
Les analystes transactionnels par exemple savent qu’il est difficile de brancher l’Adulte lorsqu’une émotion attire l’énergie de la personne dans son Enfant, et que le circuit du sentiment-parasite concerne l’ensemble de la sphère mentale : croyances, émotions, souvenirs renforçants, comportements et … somatisations, justement.
Parallèlement, les psychiatres ont pu simplifier le diagnostic de signes somatiques dans cette pathologie : on parle de symptômes physiques d’angoisse si l’on en retrouve trois sur les six suivants:
-agitation ou sensation d’être à bout
– fatigabilité
– difficultés de concentration ou trous de mémoire
-irritabilité
– tension musculaire
– troubles du sommeil
On a l’impression de lire la description clinique de la plupart des patients qui commencent une démarche de psychothérapie.
C’est dire combien les psychothérapeutes sont habitués à traiter cette symptomatologie.
Les européens, pour leur part, préfèrent attriber au TAG les symptômes suivants, dont nous dirions la même chose:
-sensation de tête vide
-étourdissement et transpiration
-tachycardie
-respiration rapide et gêne épigastrique
-sécheresse de la bouche
Là encore, voilà la description fidèle de la clientèle des psychothérapeutes, en début de traitement tout au moins, on peut l’espérer.
Le diagnostic de TAG est porté plus facilement et plus précocément qu’aux USA, car le critère de durée des symptômes est plus souple. Les auteurs insistent d’ailleurs sur le coût médical et social hallucinant, et l’inadaptation de la prise en charge .
On en vient à rêver :
Ils vont reconnaitre la pertinence de la psychothérapie, et ce ne sera pas trop tôt ! D’autant qu’ils reconnaissent que ce trouble apparait souvent à l’adolescence avec une évolution progressive vers la chronicité !
Nous reconnaissons là les éléments du scénario ” Sans joie” ou “Sans amour”.
C’est donc un événement morbide très grave dans la vie de la personne.
A l’âge adulte, ce seront des événements imprévisibles ou négatifs qui peuvent le provoquer.
Bigre, les psychothérapeutes, qui voient leurs clients arriver dans ces circonstances, justement ne seront pas étonnés. Surtout que “certains auteurs rapportent une plus grande fréquence de perte parentale précoce” : la Science confirmerait enfin que la mort prématurée des parents risque de retentir à l’âge adulte.
On avance.
Mais les TAG apparaissent souvent épaulés par leurs deux âmes damnées : le trouble panique et la dépression.
Nous reconnaissons là l’influence délétère de la carence en signe de reconnaissance, et l’absence de protection à partir d’un Parent Normatif structurant.
De même, la théorie de l’attachement éclaire la difficulté de ces patients à développer l’estime d’eux mêmes, dans une appartenance saine.
La dépression en effet ne tarde pas à s’installer, si le TAG n’est pas traité : quatre années environ seront nécessaires.
Pourvu que le traitement soit efficace ! C’est bien là le problème, et l’on a hâte de lire la fin de l’article où ce sujet va être abordé.
Hommes et femmes sont à égalité devant le Tag.
Lépine et ses collaborateurs ont retrouvé 25% de TAG chez les patients consultants en psychiatrie, et environ 15% en médecine générale.
Or, les consultants en médecine générale recouvrent à peu près la population générale : cela concernerait donc près de dix millions de personnes en France !
Voilà un problème de santé publique qu’il ne va pas falloir prendre à la légère…
Nous arrivons enfin au bout du chemin : le traitement !
LE TRAITEMENT ? LE TRAITEMENT ! LE TRAITEMENT…..
Il consiste pour nos auteurs en deux volets :
-les médicaments : soit anxiolytiques ( le bon vieux Témesta, qui endort et dont on a un mal fou à se passer ) et les antidépresseurs ( notamment la venlafaxine) dont le principal mérite est d’agir sur le “handicap social” et son action est plus nette chez les patients ayant un handicap social important au départ.
On peut supposer qu’une personne calfeutrée chez elle depuis des mois, pourra avec des antidépresseurs trouver le courage de dire bonjour à sa concierge en sortant de chez elle.
C’est le moins qu’on puisse attendre d’un traitement chimiothérapique !
Mais le meilleur reste pour la fin.
-L’autre volet thérapeutique sont des entretiens ! Ah! La psychothérapie serait-elle enfin citée par nos bons docteurs ? Vont-ils évoquer, sinon détailler l’intérêt du lien thérapeutique, du transfert, du travail de prise de conscience, des ressources, de l’économie des strokes, des bénéfices scénariques, du travail de deuil, etc. ?
Mais non, il s’agit d’entretien de “ré-assurance” visant à expliquer au patient que ses symptômes ne sont que des TAG ( voilà pourquoi votre fille est muette) et qu’il peut abandonner ses peurs hypocondriaques de faire une embolie ou un infarctus.
Tête du psychiatre s’il venait à faire vraiment un infarctus, maladie dont la prévalence n’est pas négligeable dans notre pays.
Et nous voilà au bout : le succès thérapeutique ( sic) est le plus souvent acquis grâce à l’association des médicaments et des entretiens de réassurance, puisque le patient comprendra mieux ses symptômes ( re-sic).
Quant à la recherche d’un sens psychodynamique à cette pathologie, et si le patient la souhaite, elle n’est pas exclue : ouf ! il ne manquerait plus qu’on dissuade un patient qui aurait trouvé (où?) l’information “qu’une recherche d’un sens psychodynamique” pourrait l’aider.
CONCLUSION
La formation des psychiatres à des approches psychothérapeutiques rigoureuses et efficaces est une tâche urgente.
Chaque école de thérapie mérite d’être répertoriée, entendue voire enseignée.
A charge pour elle d’avoir une démarche suffisamment explicite en terme de diagnostic et de plan de traitement pour correspondre à ce qu’un médecin attend : elle doit permettre des expériences communicables et renouvelables.
Elle doit se prêter également à une analyse statistique, seule garantie pour éviter les pièges d’un biais d’observation trop … affective.
Nous avons à nous mettre au travail pour améliorer, tous ensemble, l’avenir de la santé mentale de la population.
En se gardant d’une dérive pseudo-scientifique (chimiocentrique) d’un côté et exclusivement analytique ( sans recherche d’amélioration ) de l’autre.
Aucun commentaire