Les prodiges ne sont pas des miracles Juillet 2019

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Un prodige fascine car il expose l’irruption du surnaturel dans le naturel. 

Il n’est porteur d’aucune autre vertu que de nous étonner. 

Le miracle est plus discret : il nous change et nous permet de grandir. La fécondité du miracle est subtile, et elle porte du sens.

Un magicien indien, nous apprend un dépêche de l’AFP a voulu  récemment impressionner son auditoire. 

Il s’est fait ligoter soigneusement avec noeuds serrés et chaînes autour du cou puis  immerger dans le Gange. 

La promesse était de le voir émerger quelques instants plus tard, mouillé certes, mais libéré  de ses liens. 

Hélas, le tour a fait long feu. L’homme n’a pas réussi à se détacher. Il est mort noyé. 

Dans le Gange, pour un hindou, il parait que c’est le fin du fin, le fleuve étant sacré, puisqu’il vient directement de la chevelure de Shiva. 

Les spectateurs ont été perplexes. Les étrangers traumatisés. 

La morale de cette histoire blesse l’Enfant qui est en nous. 

Peu d’entres nous sont équipés pour admettre l’imprévu, surtout quand il est morbide ou mortifère. 

Surtout quand on est face à une grande personne qui se présente comme habile, forte et puissante. 

On a besoin de s’appuyer sur un repère solide, une parole fiable, un rocher qui tien bon.

Et si la marche s’effondre sous notre pas confiant, on se sent floué, d’autant que si l’on avait su, on se serait organisé autrement. 

On aurait anticipé la catastrophe, on aurait mobilisé autrement nos propres ressources, on aurait réduit la voilure ou revu à la baisse nos ambitions. On se serait débrouillé. 

La promesse qui fait flop, c’est pire qu’une déception : c’est une attaque en règle contre la cohérence du monde. 

Une figure d’autorité se « doit » d’assurer notre protection. 

Dût-elle faillir à sa mission que le monde tourne à l’envers : la béquille du boiteux se brise sous son poids, la sébile de l’aveugle est pillée impunément, les railleries des méchants  résonnent de toutes parts, les tricheurs triomphent, le sucre devient amer, et le lait maternel empoisonne. 

Arrivé au paradis des magiciens, notre noyé se fera passer un savon pour avoir gravement trahi les espérances les plus nobles. 

Il rejoindra les manipulateurs, menteurs, séducteurs et autres tueurs  d’espoirs qui ont fait croire qu’on pouvait leur faire confiance et qui ont fini par trahir sans vergogne. 

Qui donc offrira au contraire la parole vraie, le salut qui ne se paye pas de mot, la vie sans revers de mort ? 

Christophe Marx

Juillet 2019 .

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